Davidi Kitai, premier champion WSOP BelgeCastilla Parmilla, minuit et demi. Arnaud, Ludovic et Anthony viennent de rentrer les bras chargés de courses. Une fête se prépare, elle risque de durer longtemps. En terrasse, les discussions sont animées. Nous attendons l’arrivée du champion.
Ce fut une longue journée, épuisante mentalement et physiquement. En début d’après-midi, à son arrivée à l’intérieur de l’Amazon Room, Davidi Kitai était calme. Il s’apprêtait à disputer sa première finale des World Series of Poker. En position difficile avec le septième tapis, Davidi savait qu’il aurait besoin de beaucoup de réussite pour s’en sortir. « Je suis heureux d’avoir atteint la finale. Le reste, c’est du bonus. »
Probablement qu’il ne se doutait pas encore qu’une partie de neuf heures l’attendait, dont la moitié en tête à tête. Le poker est un jeu cruel, n’importe ayant joué quelques parties seulement le sait bien. Mais parfois, rarement, le scénario se déroule comme dans un rêve.
Davidi avait entamé la finale en position d’observateur. La table était serrée, les blindes élevées, et les tapis relativement équilibrés entre les neuf joueurs. Ce n’était pas le moment de tenter de marcher sur la table. Au lieu de ça, David a attendu, regardant ses adversaires s’éliminer entre eux. « Je ne voulais pas gâcher inutilement mes jetons », confiera t-il plus tard.
L’Anglais Michael Greco fut le premier à quitter les lieux, victime d’une cruelle confrontation entre les Rois et la seule main qu’il ne voulait pas voir en face, chez Chris Bell : les As.
Quelques minutes plus tard, Ben Robert allait rejoindre le camp des Anglais battus, perdant son petit tapis sur un coup de pile ou face.
Pendant ce tapis, Kitai ne bougeait pas, mis à part une ou deux surrelances à tapis, toujours respectées.
Ont suivi très rapidement les éliminations de Ayaz Mahmood et Robert Cheung. C’est à ce moment que Davidi se fit payer son tapis, trouvant un double-up facile contre Lee Watkinson, un peu à l’ouest avec son tirage de quinte ventrale.
Sonné, ce dernier allait sortir dès le coup suivant, Chris Bell assénant le coup fatal. Soudain, ils n’étaient plus que quatre à table : Bell s’était personnellement chargé de l’élimination de quatre des cinq sortants : il était chip-leader.
Survient alors l’entrée en scène de Davidi Kitai ! Avec une couleur trouvée sur la rivière, le Belge décrochait un uppercut à l’Allemand Jan Von Halle. La machine était lancée : Kitai allait remporter les quatre coups suivants.
Von Halle ne s’en remettrait pas. Chip-leader au départ de la finale, le mari de Katja Thater sortira en quatrième place, vaincu par Davidi.
Dès la main suivante, l’amateur Keith Greer trouvait une paire de Valets pour envoyer le tapis, payé par Chris Bell avec la pointure du dessus : paire de Dames. Pas d’amélioration sur le tableau, et l’on tenait le tête à tête final entre les deux joueurs les plus actifs de la table. Tout s’était passé si rapidement. La suite allait se révéler un peu plus longue.
Chris Bell : 1,4 millions
Davidi Kitai : 1 million
Blindes : 12,000/24,000
L’ultime confrontation fut avant tout une bataille psychologique. Un test de résistance mentale. C’est Bell qui semblait avoir la main au départ, confiant dans ses gestes face à un Kitai visiblement épuisé. L’Américain a lentement creusé l’écart, la plupart du temps en jouant passivement et en montrant la main gagnante au show-down.
Le coup clé qui a déclenché le retournement de situation se produisit au bout d’une heure de confrontation tendue. Un call extraordinaire allait relancer Kitai dans la partie.
Le tableau final est 7-As-7-8-As.
Davidi est confronté à une mise de 200,000 de la part de Bell. La moitié de son tapis, très exactement. S’il paie, et perd, il ne lui restera plus que huit blindes : le match sera virtuellement terminé. Davidi ne possède ni As, ni sept, pas même un huit. Juste un Roi et un six, qui, combinés avec le tableau, lui donnent deux paires avec un kicker Roi.
C’est un call extrêmement tendu. Il y a tellement de mains qui le battent. Il ne peut gagner que si son adversaire bluffe. Mais quelque chose sonne faux dans la mise de Chris Bell. Dans sa gestuelle, aussi.
Davidi prend une grande inspiration, envoie une prière silencieuse, et avance deux piles de jetons rouges au centre du tapis. Aussitôt, il laisse échapper un soupir de soulagement : le regard de son adversaire lui indique qu’il a eu raison.
Chris Bell jette ses cartes en secouant la tête. Avec ce call d’anthologie, Davidi Kitai s’est remis en selle, et a remporté une manche importante de la bataille psychologique qui se joue.
Bell n’allait jamais vraiment s’en remettre. Certes, le match était loin d’être terminé, et le chip-lead allait encore changer de main à de nombreuses reprises. Mais désormais, c’était Kitai qui était aux commandes.
Bell allait perdre la moitié de son tapis en tentant de bluffer Kitai qui détenait le brelan max. Oups. Tant bien que mal, l’Américain allait doubler son tapis quelques fois, mais sans jamais parvenir à représenter une menace réelle.
A vingt-trois heures, Chris Bell se retrouvait une dernière fois à tapis, avec As-Valet, juste en dessous de l’As-Dame de Davidi Kitai. Un tableau 3-7-6-10-4 plus tard, Kitai pouvait, enfin, laisser éclater sa joie.
Neuf heures plus tôt, il s’asseyait en table finale avec un petit tapis. Le chemin avait été long, et la récompense immense. Kitai devient le premier champion WSOP du Team Winamax. Il reviendra à Bruxelles en héros : jamais avant lui un joueur Belge n’avait remporté une épreuve des championnats du monde.
« Je ne réalise pas encore ce qui m’arrive. Le soutien de mes amis Belges et du Team Winamax a été incroyable. Ramener un bracelet en Belgique, cela semblait impossible. Il n’y a pas beaucoup de joueurs évoluant au haut niveau. C’est une très grande fierté. J’ai reçu beaucoup de conseils précieux de la part du Team. Les années précédentes, quand j’arrivais aux World Series, j’étais tout seul. Le soutien de l’équipe à fait la différence, et m’a aidé à tenir jusqu’au bout. »
Félicitations à Davidi Kitai, qui donne au Team Winamax une victoire de plus, point culminant (ou pas ? il reste encore quelques tournois avant la fin des WSOP) d'une saison en tout point exceptionnelle.
RésultatsPot-Limit Hold’em 2,000 dollars
Vainqueur : Davidi Kitai 244,546$2/ Chris Bell 155,806$
3/ Keith Greer 94,695$
4/ Jan von Halle 77,077$
5/ Lee Watkinson 63,313$
6/ Robert Cheung 50,100$
7/ Ayaz Mahmood 39,089$
8/ Ben Roberts 30,831$
9/ Michael Greco 22,573$
source = http://www.wam-poker.com/