Le poker du Far West, le poker le plus simple à apprendre et pourtant, le poker le plus en danger. Le Draw Poker, celui de nos parents, a été délogé par le Texas Hold’em. Une mise en péril dû à quelques confusions et un rival plus spectaculaire.
Désolé de vous taxer de souvenirs d’enfance, mais lorsque mon père accueillait ses amis pour de petites parties, le poker fermé faisait encore rage.
Certes, mais on sentait des envies d’innovation. Pullulaient alors Mexicaine, Stud, parfois même un nouveau jeu, le Texas Hold’em. On sentait le besoin de « tétines », avant qu’elles soient pompeusement nommées « cartes communes ».
A bout de souffle, le Draw Poker a subi son extrême rigueur. Démocratisation du poker oblige, ce qui se joue à la télé devient plus populaire. Le Hold’em texan rime avec la genèse du poker à Las Vegas. Et les Main Events télévisés sont, comme par hasard, dus aux casinos du Nevada.
Cette brutale substitution ne doit rien au hasard. Certes, les plus jeunes imitent les joueurs de la télé mais l’explication « populiste » ne suffit pas.
Lorsqu’on sonde 50 joueurs de poker situés entre 18 et 25 ans *:
98 % affirment préférer le Texas Hold’em. Les raisons de cette préférence ? 62 % pour le nombre de tours d’enchère ou le côté plus spectaculaire, 36 % pour la maîtrise insuffisante et enfin 2 % parce qu’il a plus de réussite en Hold’em qu’en Draw.
Tout est dit. 4 tours d’enchères contre 2 pour le Draw, 5 cartes communes contre aucune : Le Texas Hold’em semble plus clair, plus spectaculaire et plus abordable.
Pourtant, n’apprend-on pas le poker par le fermé et sa pure combinaison de 5 cartes ? Là est le paradoxe d’un Texas Hold’em qui, par sa nature « 5 cartes face ouvertes » a gommé le côté « underground » du poker.
Par sa nature « fermée », le Draw Poker subit une science des tells qui s’essouffle et en plus quelques confusions. En effet, contrairement aux idées reçues, pas besoin d’un as pour changer 4 cartes. Vous pouvez en effet changer toutes les cartes d’un seul coup lors du Draw (Draw désigne le changement de carte). Enfin, une partie de poker fermée ne se change qu’une fois. Donc deux tours d’enchères, avant le Draw et après.
Tous les casinos l’ont bien compris. En France, c’est déjà tout vu. Seul le Hold’em est en vogue, avec quelques apparitions rares du Omaha voire du Stud dans les cercles.
Même aux Etats-Unis, le Draw Poker est dépassé par ses variantes. Lors de mon séjour au Binion’s Horseshoe justement (voir un fer à cheval dans la ville du péché), j’ai vu beaucoup de HORSE, de Razz et même du Pineapple. Mais du Draw Poker nulle part. J’ai demandé à Brad Thomte, organisateur des tournois, pourquoi un lieu de légende du poker ne défend pas un poker légendaire. La réponse est cinglante : « On a essayé mais cela ne marche pas. Ca semble démodé et ça se chamaillait très souvent parce que chacun pensait que sa règle était la bonne. »
Si vous voulez jouer au poker fermé, sachez que pratiquement tous les sites de jeu proposent des cash games voire des tournois (surtout sur PokerStars) de Draw Poker, même à des limites très raisonnables (0.10/0.20 $).
Si vous voulez revoir du Draw Poker à la télé, patientez ou regardez les archives, car le dernier tournoi WSOP en Draw Poker simple date de 1986. Certains cercles tels que l’Aviation Club de France proposent du « Triple Poker Draw ». Sinon, avec vos amis, il vous reste à les convaincre ou de pratiquer le « Dealer’s choice ».
* Sondage réalisé par le journaliste dans la région parisienne.