"Je suis désolé... Nous sommes désolés."
Dans une petite salle annexe du centre de convention du Rio, Jeffrey Pollack se tient debout, nerveux devant une assemblée de 150 joueurs de poker mécontents. Les recalés du Main Event. Parmi eux, des pros tels que Tom Franklin et Mihn Ly. Derrière Pollack, les huiles d'Harrah's sont venues en nombre. Le directeur régional, le directeur du tournoi, le directeur de la communication, tous ces gens.
« Le Main Event a atteint sa capacité maximale. Croyez bien que nous détestons prendre cette décision, mais il n'y a aucune autre solution : le tournoi est complet, et les inscriptions closes. Notre logistique ne permet aucune autre alternative. »
La rumeur était fausse, donc : il n'y aura pas de Day 1E organisé en catastrophe, pas de joueurs pouvant s'inscrire pour remplir les sièges vides des joueurs éliminés, rien. Déjà, des gens se lèvent, et s'en vont.
« Notre priorité pour l'année prochaine sera de faire en sorte que ce problème ne se reproduise plus. »
Très vite des joueurs interrogent Pollack auprès du traitement de faveur qui aurait réservé envers certains joueurs « de marque ». Allégations réfutées sans contestation possible par Pollack : « Que ce soit clair : personne n'a bénéficié de passe-droit après la fermeture des inscriptions. » Ce n'est pas ce que j'ai entendu, personnellement, mais on peut comprendre que dans le climat actuel, le déni en bloc soit de mise.
C'est le brouhaha : tout le monde parle en même temps. Melissa Hayden (la compagne d'Allen Cunningham), elle aussi rejetée, tente de mettre un peu d'ordre et de calmer tout le monde. Les invectives fusent : « Pourquoi ne pourrait-on pas jouer de minuit à midi ? » « Je suis venu d'Europe spécialement pour jouer ce tournoi, j'attendais depuis un an ! » « Faites de la place dans une autre salle ! » « C'est le plus grand tournoi du monde, et des centaines de joueurs sont mécontents ! »
Mais les joueurs ne rencontrent qu'un mur, et je ne peux pas donner tort à Harrah's. Seth Palansky, directeur de la comm' des WSOP, s'avance et lance la question qui est sur les lèvres de tous les médias observant la scène : « Pourquoi vous ne vous y êtes pas pris plus tôt ? Il avait quatre journées de départ, tout de même !» Tollé général. C'est la question qui fâche. Manque de diplomatie, sans doute, mais aussi et surtout une remarque de bon sens.
Pollack n'a rien à dire qui pourra calmer les joueurs, et très vite le débat est clos. Les deux camps s'en vont, définitivement pas réconciliés.
Deux questions :
1/ Harrah's a t-il pris la bonne décision aujourd'hui en fermant les inscriptions ? OUI, sans hésiter. La tenue d'un Day 1E en catastrophe était tout simplement impossible, pour des raisons logistiques et le personnel impliqué : croupiers, superviseurs, etc, qu'il aurait été difficile de trouver en moins de 24 heures. Un tournoi de cette taille se planifie bien à l'avance, et les joueurs auraient du prendre exemple en se préparant eux aussi à l'avance. Les inscriptions aux WSOP étaient ouvertes dès la fin du mois d'avril.
2/ Y'a t-il eu traitement de faveur pour certains joueurs ce matin, après la fermeture des inscriptions ? Là aussi, malgré les dénégations, il semblerait que la réponse soit... PEUT-ÊTRE, malheureusement. D'après les informations dont je dispose, au moins trois joueurs auraient réussi à s' « incruster » en douce après onze heures. Deux grands professionnels des cash-games, et une actrice hollywoodienne peu connue mais disposant de bonnes relations, qui ne possédait pas son ticket avant d'atterir à Las Vegas ce matin à 10 heures 30. Une pratique que j'ai déjà pu observer durant les tournois préliminaires, surtout lors des « donkaments » toujours complets. Une pratique à condamner, bien entendu, mais les passe-droits existent dans tous les milieux, et le poker ne fait pas exception.
C'est tout pour maintenant. Jeffrey Pollack répondra à d'autres questions lors de la conférence de presse officielle des WSOP, organisée lors de la journée de pause entre le Day 2B et Day 3.